Afghanistan : le désastre

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Le recul est nécessaire à la compréhension. Ce qui se passe actuellement en Afghanistan peut être vu sous l’angle étroit de quelques années ou au contraire perçu à la lumière d’une histoire plus longue. Cette dernière nous apprendrait que ce pays est surtout un espace géographique tribal, morcelé et incontrôlable entre deux civilisations, celle de l’Iran et celle de l’Inde. Si les invasions musulmanes ont déferlé sur l’Inde depuis l’Afghanistan comme celle de Mahmoud le Ghaznévide au XIe siècle, ce pays est demeuré inviolable et l’un des rares à n’avoir pas été colonisé.

Soucieux de ne pas l’abandonner aux Russes toujours désireux d’approcher les mers chaudes, les Anglais ont livré trois guerres victorieuses contre les Afghans. Les deux premières ont été suivies de révoltes et du massacre de Britanniques. La troisième en 1919 s’est conclue par une victoire diplomatique des Afghans, qui, bien que battus, ont récupéré leur totale souveraineté perdue lors de la seconde. Londres avait compris que ce pays indomptable ne valait pas tant de sacrifices.

Aussi, peut-on comprendre qu’à nouveau les Anglo-saxons, Américains cette fois, aient été ravis d’infliger indirectement une cuisante défaite aux Soviétiques, c’est-à-dire aux Russes, en armant les guerriers afghans. En revanche, il est plus difficile d’admettre que les Occidentaux soient tombés eux-mêmes dans le piège afghan. Après le départ des Soviétiques, le pays avait été laissé aux “seigneurs de la guerre” comme le Pashtoun Gulbuddin Hekmatyar, le Tadjik Ahmed Mahmoud ou le Hazara Abdul Ali Mazari. Ces derniers tiraient leurs revenus de la culture du pavot et donc du trafic de l’opium et de ses dérivés.

En 1996, les “Talibans”, nommés ainsi en raison des étudiants formés dans les écoles coraniques pakistanaises qui jouent un grand rôle dans ce mouvement, prennent le pouvoir, unifient d’une certaine manière le pays en y faisant régner la loi islamique la plus stricte. Certes, la culture du pavot est en grande partie prohibée, mais la musique et les images, aussi. Les Bouddhas de Bàmyàn sont dynamités, et les femmes réduites à une condition qui suscite à juste titre la honte et l’horreur en Occident. Al-Qaïda s’installe dans le pays et y planifie ses actions terroristes jusqu’à celle du 11 septembre qui va entraîner une opération américaine de représailles soutenue par d’autres forces de l’OTAN et de ses partenaires sous le nom de “Force internationale d’assistance à la sécurité” (FIAS).

La FIAS a été l’une des plus vastes coalitions de l’histoire et la mission la plus longue et la plus exigeante que l’OTAN ait jamais eu à mener. À son niveau d’effectifs maximal, la force comptait plus de 130.000 soldats, provenant de 50 pays membres. Des milliers de morts plus tard, dont 90 soldats français, notamment les dix tombés lors de l’embuscade menée par les Talibans à Surobi le 18 avril 2008, le pays est à la veille de redevenir un émirat islamique dirigé par un groupe terroriste ! Les talibans ont avancé à un rythme effréné ces derniers jours. En une semaine, ils ont pris le contrôle de 13 des 34 capitales provinciales afghanes. Ils ont aussi encerclé Mazar-i-Sharif, la plus grande ville du nord.

Mesure-t-on le désastre et ses répercussions ?

Christian Vanneste, Boulevard Voltaire

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