Zemmour-Onfray : un débat de haute tenue entre deux belles intelligences

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Riposte Laïque

Deux grandes figures de la pensée intellectuelle s’affrontent ce soir sur le plateau de CNews, dans l’émission « Face à l’info », animée par Christine Kelly. Un duel au sommet  Zemmour-Onfray  portant sur l’avenir de la gauche, sujet  pour le moins passionnant vu le champ de ruines qu’est devenue cette gauche française, naguère si arrogante.

Il faut s’attendre à un record d’audience car le casting est du même niveau que le face-à-face Zemmour-BHL, en octobre dernier.

Entre le journaliste-écrivain et le philosophe, j’ai évidemment un faible pour Zemmour, car je trouve Onfray assez déroutant dans ses propos ou ses choix passés.

Autant  Zemmour est  constant dans son discours patriote et bien câblé dans sa vision du monde, autant  Onfray louvoie et reste difficile à cerner.

Quand  Zemmour est régulièrement attaqué pour ses positions politiquement incorrectes, systématiquement caricaturées en discours raciste et islamophobe, Onfray, quant à lui, est critiqué pour ses incohérences et ses approximations.

Tantôt accusé d’enfoncer des portes ouvertes, tantôt traité d’imposteur ou d’escroc intellectuel, Onfray  est aussi peu clair dans sa pensée que Zemmour est limpide.

Onfray se dit « athée chrétien », reconnaissant par là l’héritage culturel judéo-chrétien de l’Europe. Il se réclame du « postanarchisme », après avoir soutenu Besancenot en 2002 et se dit favorable au capitalisme libertaire. Bref, beaucoup trop subtil pour moi !

Ses positions anti-RN sont décevantes, alors qu’il nous dit que l’islam est la religion qu’il faut craindre et que le roman « Soumission » de Houellebecq  pourrait bien devenir réalité si l’écart démographique entre musulmans et natifs se poursuit…

Quant à sa position sur les attentats de 2015, qui laisse entendre que la France a semé les germes du terrorisme en allant combattre l’État  islamique, elle laisse pantois.

Mais qui suis-je pour juger un philosophe de renom ? Place au débat.

19 h, nos deux duellistes s’installent.

Interrogé sur sa nouvelle revue « Front populaire », Onfray explique qu’il a choisi ce titre car l’avancée sociale de 1936 s’est faite sans couper des têtes comme en 1789.

Ce à quoi Zemmour rétorque qu’il est d’accord sur ce point,  mais que le Front populaire a désarmé la France pendant qu’Hitler réarmait l’Allemagne. Le pacifisme a mené au désastre.

Christine Kelly vient sur le terrain du souverainisme, revenu en force avec la crise sanitaire et la pénurie.

Pour Onfray, le souverainisme est un mot qu’il faut réhabiliter à gauche. Il vaut mieux être souverain que valet, maître de son destin qu’esclave. Le progressisme a sali les mots populisme et souverainisme.

Zemmour  ajoute que la crise a montré que le camp du « non » à Maastricht avait raison. Nous sommes démunis de tout et devenus esclaves de la Chine, au point que celle-ci devient arrogante et nous a délestés de tout notre tissu industriel. « Les Américains ont tout inventé mais ils n’ont plus d’usines ».

Onfray rappelle que nous sommes tributaires des Chinois pour les matériaux rares, y compris ceux qui servent à notre outil de défense le plus vital.

Un long débat s’ensuit sur les classes populaires, « droguées » aux prix faibles selon Zemmour, et qui consomment mal. Ce à quoi Onfray répond qu’elles n’ont pas le choix.

Pour Zemmour, c’est à cause de ce consumérisme bon marché que la France a dû délocaliser toute son industrie.

Onfray souligne que l’objectif du libéralisme débridé c’est un gouvernement planétaire.

À ce moment, Zemmour enfourche son cheval de bataille habituel : celui de la préférence nationale.

Le peuple étant drogué aux allocations multiples, comment relocaliser tout en finançant un social démesuré ? Impossible.

La seule solution pour soulager nos entreprises écrasées de charges est de réserver le social aux seuls Français.

Pour Onfray, il convient de lutter contre les paradis fiscaux et de restaurer l’ISF. Désaccord total entre Zemmour et Onfray sur cet impôt inique, qui ne rapporte rien.

Zemmour veut lutter contre la fraude sociale de 40 milliards, les 2 millions de fausses cartes Vitale et les retraites payées aux centenaires étrangers.

Onfray réclame plus de justice sociale dans l’intérêt national et demande où va l’argent.

Réponse de Zemmour : Ça passe dans les allocations ! 42 % des allocations sont servies à des étrangers.

Onfray défend un social sous conditions de ressource alors que Zemmour défend l’universalité des prestations sociales. Désaccord complet.

Pour Zemmour, la France est le pays où la redistribution des richesses est la plus marquée.

En matière de social, il ne faut pas opposer les riches aux pauvres, mais les Français aux étrangers.

À la question « la gauche peut-elle être souverainiste », Onfray répond que seule une vraie gauche de conviction le peut.

Mais pour Zemmour, la gauche est devenue libérale et universelle. Elle a renoncé, comme Macron, à la patrie, à la nation, au souverainisme. Elle est devenue mondialiste.

Onfray veut réunir, au-delà des partis, les souverainistes de tous bords, de droite, de gauche, mais aussi tous ceux qui ne votent plus ou ne se reconnaissent plus dans aucun parti.

Vient la question de Christine Kelly :

« Qu’est-ce qui fait l’essence de la France » ?

Aussitôt Onfray s’enflamme, citant sa littérature, sa liberté d’esprit, son intelligence, sa culture, ses traditions, sa langue, sa cuisine, son art de vivre, sa façon d’être, son patrimoine et j’en oublie ! La France est ouverte à tous ceux qui l’aiment.

Pour Zemmour, la réponse est plus sobre : la France, c’est un peuple, un territoire, une civilisation aux racines chrétiennes (de Gaulle).

Ce sont le catholicisme et l’État qui font la grandeur de la France. La France sans État n’est plus rien !

Onfray défend un État  girondin et dénonce cette Europe libérale qui oublie les peuples.

Pour Zemmour, il faut un État puissant comme le voulait de Gaulle avec le nucléaire. L’Europe ne fait que renforcer les régions pour mieux détruire les nations (Espagne).

Le débat se termine sur une invitation d’Onfray à Zemmour pour qu’il écrive un article pour la revue Front populaire, dont le premier numéro sera en kiosque et en ligne fin juin.

Un débat de haute tenue, courtois et respectueux, entre deux grosses pointures qui s’estiment et s’apprécient mutuellement. Deux belles figures intellectuelles éminemment cultivées, qui maîtrisent parfaitement  le sujet et sont souvent d’accord.

Bref, un régal.

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