Russie-Ukraine. La guerre de «Hitler» contre «Hitler»

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Articles  :  Mar. 2022Fev. 2022 – Jan. 2022 –   Dec. 2021   – Facebook : https://www.facebook.com/ORTF-News-107572991571884

Rien ne s’oppose plus à Homo festivus que la guerre. Sorti de l’histoire, il n’en conçoit même pas la possibilité. Elle est le Mal majuscule, un reliquat des âges barbares, quand bien même elle est à sa porte. Ainsi raisonne l’Empire du bien, pour recourir à une autre expression de Philippe Muray. Or, ce que ne dit pas la guerre qui oppose la Russie et l’Ukraine, du moins dans le traitement qu’en donnent les médias, c’est qu’elle cache aussi un affrontement de deux visions du monde : l’une qui admet la réalité de la guerre, l’autre qui en nie jusqu’à la possibilité.

Une guerre de représentations du monde

Essayons de comprendre une fois pour toutes que l’enjeu, dans cette guerre, ce n’est pas seulement la « volonté de puissance » entre pays. Il ne s’agit pas seulement de la soif d’un pays de dominer un autre. Ou de prévenir la menace que représenterait l’entrée d’un autre pays dans un pacte militaire qui placerait des missiles à 500 kilomètres de Moscou, une distance à laquelle, si un missile vous tombe sur la figure, vous n’avez même pas le temps de l’intercepter. Il y a d’ailleurs assez de missiles pointés vers la Russie, tant en Pologne que dans les États baltes. Pourquoi diable en veulent-ils davantage ? Oh oui, ils le veulent pour préserver la paix, la démocratie, la gouvernance mondiale et l’Agenda 2030.

Soyons sérieux. Après l’effondrement du communisme et la liquidation du Pacte de Varsovie, maintenir l’OTAN et étendre ses arsenaux à des pays toujours plus proches de la Russie, c’est comme si le Mexique cherchait à rejoindre un Pacte de Varsovie renaissant et à installer des missiles à la frontière américaine.

Pourtant, rien de tout cela n’est vraiment la question dernière. Aussi importantes soient-elles, ce ne sont ni les frontières ni la sécurité militaire qui sont ici l’enjeu dernier. Ce qui est vraiment en jeu, c’est d’abord (Alexandre Douguine le reconnaissait tout récemment sur Facebook) une vision du monde qui s’oppose brutalement à une autre. C’est d’une lutte de paradigmes qu’il s’agit. D’une part, celui de la société liquide, sans foi ni valeurs, sans histoire ni principes : un vulgaire agrégat d’atomes enveloppés de laideur, d’absurdité et de non-sens. Face à lui, le paradigme de la société solide, organique, enracinée dans le passé de son histoire, affirmée dans l’identité de sa nation, enveloppée dans ses valeurs et principes, marquée par le souffle sacré de sa religion.

Homo Festivus ou Homo heroicus, il faut choisir

Pardon ?… Ah, vous adhérez à de tels principes, mais vous n’aimez pas du tout la façon dont ils sont incarnés dans la société russe ? Écoutez, pour être honnête, je vous dirai que moi non plus, je n’aime pas certaines choses de cette société. Je n’aime pas, par exemple, le risque – inhérent à tout nationalisme – de tomber dans un chauvinisme borné. Plus particulièrement, je n’aime pas le fait que, incapable de remettre en question quoi que ce soit de son passé historique, la Russie continue d’honorer la mémoire du régime le plus atroce qu’on ait jamais connu. J’admire, certes, le fait que la damnatio memoriæ, si brutalement pratiquée ailleurs, ne l’ait pas été en Russie ; mais ce sont là deux choses tout à fait différentes.

Je n’aime pas non plus la façon dont la Pologne ultra-catholique, pour parler d’un pays appartenant à l’autre côté et pour lequel j’ai toute ma sympathie, verse également dans un chauvinisme borné : dans ce chauvinisme qui l’empêche de comprendre que, si la Pologne s’oppose à l’american way of life et à tout ce que l’Union dite « européenne » incarne, son véritable ennemi n’est alors ni la Russie ni Poutine. Ses vrais ennemis sont l’Amérique, l’UE, Soros et compagnie.

Je n’aime pas non plus le risque que court – et fait courir – Poutine, celui de s’enhardir une fois de plus (c’est arrivé tant de fois déjà dans l’histoire…), de s’abandonner à l’hubris, de laisser libre cours à une arrogance démesurée, celle qui conduit à prétendre conquérir tout ce qui peut être conquis. Je n’aime pas ce genre de choses (j’insiste). Mais au point où l’on en est, on sait déjà très bien que la perfection n’est pas de ce monde, et qu’à moins d’un monde idéal qui coïnciderait avec lui-même, il n’y a pas de monde que l’on puisse pleinement aimer ou auquel on puisse pleinement adhérer. Il faut donc choisir, prendre parti : soit en faveur de la vision du monde d’Homo Festivus, soit en faveur de celle d’Homo heroicus. À vous de choisir.

Disant cela, je ne nie pas qu’il y ait des comportements héroïques parmi les défenseurs ukrainiens. Il y en a et il faut s’empresser de les saluer si l’on ne veut pas tomber dans le sectarisme dénoncé plus haut. Le problème est que ces héroïques Ukrainiens ne semblent pas réaliser à quel point leur courage indéniable contredit le type de société pour lequel leur pays et eux-mêmes ont jusqu’à présent parié.

Javier Portella, dans Éléments pour la civilisation européenne

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