Le premier faux pas de Marine Le Pen

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Articles  :  Fev. 2022 – Jan. 2022 –   Dec. 2021 –   Facebook : https://www.facebook.com/ORTF-News-107572991571884

Marine Le Pen déroulait jusque là une belle campagne. Le mot flatteur et à la mode de « résilience » était celui qui la qualifiait le mieux. Les départs semblaient peu l’ébranler, ou en tout cas elle semblait avoir la capacité de les encaisser, seul celui de sa nièce l’avait visiblement atteinte, elle avait su le montrer sur CNews face à Laurence Ferrari, sans le surjouer, d’une façon propre à toucher le téléspectateur. Au point que L’Express, il y a quatre jours, titrait : « Ralliements à Zemmour : et si Marine Le Pen en sortait grandie ? ». Elle semblait garder ses nerfs et de la hauteur quand Éric Zemmour l’attaquait avec une morgue un peu maladroite : « Elle c’est les chats, moi c’est les livres » ou encore « Marine Le Pen c’est l’Arlette Laguillier de la droite nationale » (BFMTV).

Puis patratas. L’entretien qu’elle vient d’accorder au Figaro est le premier faux pas. Et il est de taille. 

Après avoir déroulé un programme familial que n’aurait pas renié Viktor Orban, elle taxe soudain le zemmourisme de « communautarisme », ce mot qu’on accole habituellement à « islamique » : « Je retrouve chez Éric Zemmour tout une série de chapelles qui, dans l’histoire du FN, sont venues puis reparties remplies de personnages sulfureux. Il y a les catholiques traditionalistes, les païens et quelques nazis. Tout cela ne fait pas une posture présidentielle ». 

User, à l’encontre d’Éric Zemmour, du champ sémantique reductio ad hitlerum, cette arme de dénigrement massif qui a permis depuis quarante ans de museler le « camp national » comme se plaît à l’appeler Jordan Bardella, est vécu comme une trahison chez les Zemmouristes et trouble jusque dans les rangs du RN. Sur les fils Télégram des fédérations départementales, les messages atterrés sont allés bon train toute la journée.

Mettre sur le même plan, sous le vocable de « chapelles remplies de personnages sulfureux », les catholiques traditionalistes et les nazis, même Marlène Schiappa n’aurait pas osé, confie un vieil adhérent, ulcéré.

Et le faire, en sus, dans le Figaro est pour le moins curieux. Il est d’usage, quand un candidat à la présidentielle répond à un média de prendre en compte la sociologie des lecteurs pour les gagner à sa cause. Or s’il se trouve parmi les lecteurs du Figaro un vivier d’électeurs potentiels pour elle, ce sont des catholiques conservateurs. Pas sûr qu’être qualifiés de sulfureux et être assimilés à des nazis les ait totalement séduits…

Ce faisant, elle donne par ailleurs raison en creux à ceux qui viennent de la quitter, et qu’elle a accusés d’être partis non en raison de sa ligne, comme ils le prétendent, mais moins glorieusement parce qu’ils seraient frustrés de ne pas avoir décroché la place qu’ils souhaitaient. Marion Maréchal, icône du « camp national » dont l’étoile avait un peu pâli sur fond de trahison familiale désapprouvée par son grand-père lui-même, voit, grâce à cette sortie son honneur lavé : comment pourrait-elle soutenir une candidate, fût-elle sa tante, qui associe tranquillement dans la même phrase, par une apposition, les catholiques traditionalistes et les nazis ?

Cerise sur le gâteau en forme de boomerang, Marine Le Pen, accrédite a posteriori, les accusations portées par le passé contre son propre mouvement et celui de son père : ce que la gauche dénonçait était donc vrai ? Il y avait donc bien des « personnages sulfureux », et même des « nazis » ? 

Il est désormais établi qu’une bonne partie du très jeune et très puissant maillage militant “Z” que ses concurrents lui envient, tant sur le terrain que sur la toile (au point que Le Monde les a pris pour des « robots »), est constitué pour grosse partie de jeunes catholiques, issus, pour faire vite, des rangs de la Manif Pour Tous. Dans un monde individualiste où trouver des militants désintéressés ne comptant pas leur temps est difficile, cette société « holiste », habituée à donner de son temps à sa paroisse, au caritatif ou à de grandes causes sociétales, répond présent quand on lui dit qu’il s’agit de sauver son pays et sa civilisation. Si d’aventure, Marine Le Pen parvenait au second tour, elle aurait besoin de leur énergie et leur savoir-faire de « digital native ». Les électeurs des milieux catholiques conservateurs seraient aussi aussi un appoint nécessaire. Après avoir été ainsi étrillés, leur enthousiasme pour aller voter risque d’être quelque-peu émoussé.

Gabrielle Cluzel, Boulevard Voltaire

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